« Plutôt » vient de la soudure de la locution « plus tôt ». « Plutôt » s’est longtemps écrit « plustost » avec deux « s » muets. Le premier « s » a disparu au XIXe siècle (1835) et le second a été remplacé au XVIIe siècle par l’accent circonflexe qui est souvent la marque d’un ancien « s ».
La finale « t » s’explique comme celle de « tôt », « aussitôt » ou « bientôt ». L’adverbe « tôt » vient du latin « tostum », participe neutre de « torrere » qui signifie « griller, dessécher ». Un glissement de sens s’opère alors entre ce qui est « grillé » et l’idée de rapidité, « tôt » signifiant à l’origine « vite ». Rapidité qu’on retrouve dans le torrent, qui vient de « torrens », participe du même verbe latin. On retrouve cette métaphore de rapidité dans une expression comme « griller, brûler un feu rouge » : pas le temps de s’arrêter !
« Plutôt » a perdu son sens temporel, « plus rapidement », qui a été conservé par locution « plus tôt », opposée à « plus tard ». « Plutôt » a un sens préférentiel, « plus volontiers » ou exprime un degré moyen (« On la trouvait plutôt jolie, Lily », P. Perret). Le « t » final a été conservé pour l’étymologie. Avec le circonflexe, il évite aux enfants lecteurs la confusion avec le fidèle compagnon de Mickey, Pluto.
Jean-Christophe Pellat est professeur de Linguistique française à l’Université Marc Bloch – Strasbourg 2.
Ses enseignements et ses recherches portent sur la grammaire et l’orthographe françaises, dans leurs dimensions historiques, descriptives et didactiques. Il est co-auteur d’un ouvrage universitaire de référence, Grammaire méthodique du français (PUF, 1994).
En complément de ses activités en France, il est responsable de différentes actions d'enseignement du français en collaboration avec des universités étrangères, notamment en Azerbaïdjan, en Iran et aux États-Unis.